Une action complémentaire du Conservatoire de Loir-et-Cher
Depuis plus de trente ans, l'engagement des Conservatoires en faveur des espaces naturels s'appuie d'abord sur la maîtrise foncière. Ce mode d'action, aussi performant soit-il, a cependant ses limites. Maîtriser le foncier n'est pas toujours envisageable et certaines espèces, devenues très rares et présentes ponctuellement, sont souvent dépendantes des activités agricoles. Dès lors d'autres solutions sont possibles pour les préserver durablement. A cet effet, le Conservatoire a décidé en 2005 de conforter ses actions foncières par un plan de conservation de la flore la plus menacée de disparition. Ce plan concerne les espèces qui se sont raréfiées dans notre département au cours des 120 dernières années.
Les plantes « messicoles »
Parmi les plantes prioritaires, notamment suite à l'usage intensif des herbicides, les « messicoles » (plantes liées aux moissons) comptent parmi les plus vulnérables. Certaines d'entre elles, non revues depuis des années, sont probablement déjà éteintes dans notre département, mais d'autres existent encore en faible nombre. Depuis 2006, le Conservatoire a mis en place un « Plan de sauvegarde des plantes messicoles » concernant actuellement les espèces suivantes :
- Adonis d'automne (Adonis annua)
- Bleuet (Centaurea cyanus)
- Carthame laineux (Carthamus lanatus)
- Caucalis fausse carotte (Caucalis platycarpos)
- Chrysanthème des moissons (Glebionis segetum)
- Galéopsis à feuilles étroites (Galeopsis angustifolia)
- Germandrée botryde (Teucrium botrys)
- Guimauve hérissée (Althaea hirsuta)
- Ibéris amer (Iberis amara)
- Pied d'alouette d'Ajax (Consolida ajacis)
- Pied d'alouette royal (Consolida regalis)
- Passerine annuelle (Thymelea passerina)
- Nielle des blés (Agrostemma githago)
Pilotée par Claude Henry, aidé notamment d'Evelyne Cantone du Conseil scientifique pour la recherche des messicoles situées au sud de la Loire, l'action consiste à retrouver les espèces sur le terrain pour en récolter des graines en vue de semis encadrés destinés à multiplier les individus et le stock de semences. Ces graines sont ensuite semées sur des sites « pilotes » maîtrisés par le Conservatoire.
En plus des recherches de terrain, le tri minutieux des graines, leur conservation, l'étude de la germination, le suivi des semis..., ont demandé beaucoup de temps. Des partenariats ont eu lieu avec des particuliers, le Lycée horticole de Blois, le Jardin botanique de Tours et enfin la commune de Vineuil pour la multiplication des plantes et la présentation de jardinières « conservatoires ».
Depuis, les espèces multipliées ont été réimplantées sur plusieurs sites du Conservatoire où leur maintien nécessite un travail du sol (labour, hersage,...) réalisé tous les 2 ou 3 ans, souvent bénévolement par des agriculteurs locaux.
Les rosiers sauvages
Plusieurs sites du Conservatoire accueillent des rosiers sauvages en régression. Une démarche exemplaire de conservation a été entreprise pour leur préservation depuis 2008 avec leur multiplication hors site par bouturage (notamment Rosa stylosa et Rosa elliptica). A moyen terme, les rosiers bouturés seront réimplantés sur des sites favorables du Conservatoire.
Le peuplier noir
Espèce indigène, le peuplier noir (Populus nigra) possède des caractéristiques naturelles : résistance aux maladies et parasites (il n'est pas affecté par le gui), qui en font une essence bien adaptée à son milieu que les paysans avaient abondamment conduite en têtard. Aujourd'hui son patrimoine génétique est de plus en plus altéré par une hybridation avec d'autres peupliers.
Le Conservatoire s'est récemment associé à la démarche de l'INRA d'Orléans en vue de préserver le génome caractéristique de cette espèce. La recherche de sujets antérieurs au développement de la populiculture (150 ans ?) est en cours. Certains arbres des prairies du Fouzon ont déjà été identifiés et feront l'objet de prélèvements en vue d'une multiplication par bouturage avec l'objectif d'une réimplantation dans leur contexte d'origine.